Ma pote écrit un blog. Elle écrit sur les femmes, le sexe, son taf, sa vie, la vie tout court aussi.
Son blog, elle l’a ouvert à quiconque souhaitait y participer. Je souhaitais y participer.
Mais je n’avais pas d’idée. Et moi, je n’écris pas parce que je dois, j’écris parce que je ressens.
Aujourd’hui ma pote a sorti un nouvel article, qu’elle conclut ainsi.
Je m’excuse auprès de toutes les personnes asexuelles, l’asexualité est un sujet que je connais mal, que je ne maîtrise pas, c’est pour cela que je n’en parle vraiment pas dans mes articles
Et aujourd’hui, j’ai ressenti, alors j’écris
Quoi ! Si cette pote-là, qui parle de sexualité toute la journée, qui voit des dizaines de femmes par semaine, sous toutes les coutures et surtout les plus intimes, qui court dans des ateliers sexo et lit sur le sujet plus que ce que lis en un an, si cette pote-là ne connait pas l’asexualité : alors qui connait ?
Eh bien, moi. Enfin je crois. Je crois que je connais un peu ça.
En vrai, c’est pas l’asexualité que je connais. Ce que je connais c’est une sensation de pas être comme tout le monde.
C’est passer toute ma maternelle sans « amoureux », mais aussi ma primaire et une bonne partie du collège. J’y ai même jamais pensé en fait. Les garçons sont mes copains, on joue, on se bat, on rit, on chante et puis voilà.
Et puis fin du collège, je me rends bien compte que quand même…. « tous les garçons et les filles de mon âge se promènent dans la rue deux par deux, tous les garçons et les filles de mon âge savent bien ce que c’est d’être heureux. Et les yeux dans les yeux, et la main dans la main…. » (moi aussi je sais pousser la chansonnette) !
Bref, je me rends donc bien compte qu’il y a un truc qui a l’air d’être cool dans le fait d’être avec un mec, de le tenir par la main, d’être dans ses bras à la récré, de l’embrasser…. Mais c’est quoi ce truc ? Pourquoi moi je ressens pas tout ça ? Ah oui, je peux les trouver très beaux, mais voilà quoi, ça s’arrête là.
Bon, la curiosité est un vilain défaut, mais c’est le mien ! Je suis en 4ème, je reçois un soir un SMS d’un mec de l’autre classe « tu veux sortir avec moi ? ». Allez, c’est l’occaz, je me demande bien ce que ça fait d’embrasser. Je réponds « Oui ».
Le lundi dans la cour je savais pas trop quoi faire, ni comment me comporter. Je crois que je l’ai évité du coup. Et puis à un moment, on a fini par s’embrasser. Franchement ? Je m’en souviens pas, si ce n’est que je n’ai ressenti aucune émotion. Rien. Rien d’agréable, rien de désagréable. Rien. C’était bon, c’était fait. J’avais embrassé, curiosité assouvie. Quelques semaines après on rompait.
Et puis plus rien, pendant des années. Plus rien parce que pas le besoin.
Vient la première. Je me rends bien compte qu’il y a un truc qui à l’air cool dans le fait d’être avec un mec, de le tenir par la main, de passer sa main sous son t-shirt, d’être serrée contre lui, de se sentir désirée… Mais c’est quoi ce truc ? Pourquoi moi je ressens rien de tout ça ? La suite vous la connaissez, la curiosité tout ça tout ça…
Quelques flirts d’été avec caresses appuyées et quelques vêtements ôtés, un après midi en duo à pas vraiment parler. Et un jour de mai, la fameuse « première fois ». Check
Celle qui est si importante pour tant de gens, si mystifiée, si fantasmée, si attendue, si intense, si….insignifiante pour moi.
Ce gars on était ensemble depuis quelques semaines, il était sympa, sensible, déjà expérimenté sexuellement, très intéressant dans sa personnalité et ses passions. Ce gars, j’ai couché avec lui. Sans désir mais pas sans envie. J’avais envie de savoir ce que c’était, j’avais envie d’assouvir ma curiosité, mais je n’ai jamais ressenti aucun désir pour lui. Pas non plus de plaisir. On la refait quelques fois. C’était pour moi aussi neutre que regarder la télé, complètement mécanique. Et puis la relation s’est finie.
Le suivant dans ma vie, c’est différent. Le suivant il a été important. Le suivant je me souviens, au début j’ai eu du désir. Des sentiments sont apparus chez moi, pour la première fois. Des sentiments forts, des sentiments que je ne connaissais pas. L’amour. Et avec lui le plaisir.
Faire du sexe ne me laissait plus indifférente. Ca me faisait du bien, physiquement. Le plaisir est toujours resté, mais pas le désir. Ça a été fugace. J’ai quelques souvenirs de désir. D’envie de faire l’amour, d’initiatives pour passer à l’action…. Mais j’en ai peu. Avec lui, ça se compte sur les doigts d’une main les fois où j’ai désiré. En trois ans. En revanche j’ai toujours apprécié, au cours du rapport l’excitation montait, je jouissais…. Aucun « problème » de ce côté-là.
Je dis problème, parce qu’avec le suivant, mon actuel, c’est bien d’un problème qu’il s’agissait.
Au début pas trop. La curiosité, toujours celle-là, a, je pense, aidé à masquer. Envie de découvrir l’autre, donc partante pour des moments d’intimité sans trop de souci.
Mais rapidement la différence de libido se fait sentir. Je ne prends jamais aucune initiative, et je ne suis pas toujours très enthousiaste à l’idée d’un détour sous la couette.
J’ai pas le temps là tout de suite, j’ai d’autres choses à faire, et puis faut se chauffer, se donner, s’impliquer, donner, terminer, se doucher….. Ca me semble long, pesant, barbant. Quand je décide de me laisser convaincre je suis bien obligée de me rendre à l’évidence : ouais c’est long à démarrer, mais faut bien avouer que c’est agréable, c’est chaud, c’est doux, c’est apaisant, c’est excitant, c’est jouissif, c’est bon ! C’est juste que franchement je n’y avais pas pensé.
Et je n’y pense JAMAIS !
A deux, on en a parlé, beaucoup. Il aurait bien aimé que j’initie les choses parfois, il aurait aimé se sentir beau, se sentir désiré par celle qu’il aime, rien qu’une fois. Il aurait adoré me voir coquine, sexy, demandeuse. Ca m’était impossible. Il l’a accepté. L’a compris. Mais pas moi. Moi je comprenais par pourquoi j’étais comme ça. Pourquoi je n’avais jamais envie. Il en souffrait et moi aussi. En me parlant de sa frustration, il ne voulait pas me coller la pression. Et moi je culpabilisais. Qu’est ce qu’on a oublié de me fournir au moment de ma fabrication pour que dans la zone sexe de mon cerveau il ne se passe juste RIEN ?
Et un jour j’ai lu. Un article je crois. Sur l’asexualité.
Mais attendez : ce que je lis là, c’est moi ! Il existe un mot pour ce que je suis, pour QUI je suis. Je suis donc quelque chose qui existe. Je suis pas juste bizarre. Je suis pas juste une étrangère face à cette masse de gens qui mettrait bien « Jessica Alba ou Josh Hartnett » dans leur lit alors que moi je vois juste des personnes magnifiques, mais c’est tout (oui, je suis vieille, jugez pas mes références beauté !). Je ne suis pas anormale dans ce monde où les gens se choppent en soirée, ont des plans cul ou font l’amour tous les jours alors que moi je ne suis sortie qu’avec des amis et peux coucher qu’une fois par mois sans que ce soit problématique ? La révélation.
L’asexualité, c’ est ne pas avoir d’attirance sexuelle, et il en existe tout un spectre en fait. Avec des mots un peu chelous qui font sourire, des mots pour se définir et ne plus souffrir.
Moi je crois que je me reconnais dans le terme greysexuelle (personne qui ressent du désir sexuel pour quelqu’un extrêmement rarement ou dans seulement certaines circonstances particulières et ponctuelles) et aussi demi-sexuelle (personne qui ressent de l’attraction sexuelle pour son ou sa partenaire seulement après qu’un fort lien, généralement amoureux, et un fort degré de confiance ont été construits).
En gros, ce qui est plutôt cool pour mon couple monogame, c’est que je n’ai a priori de désir que pour mon mec. Ce qui est moins cool c’est qu’en dix ans….ça n’est arrivé qu’une fois !
Une fois où je me suis réveillée la nuit, j’avais envie de lui, c’était intense. Je l’ai réveillé, je lui suis montée dessus, je l’ai embrassé, je l’ai chauffé. J’avais un besoin profond de le sentir en moi. On a fait l’amour, il était ravi. Ce fut la seule fois. J’ai aimé ressentir ça.
L’asexualité c’est environ 1% des gens. Pas de chance pour nous, car c’est pas le plus simple à gérer dans un couple où la libido de l’autre est plutôt au taquet. Alors on parle, on tâtonne. Je sais que des fois il faut que je me motive un peu pour commencer un rapport, parce qu’une fois que ca monte, ca fait du bien, je kiffe. Mais pfiou, je pars de tellement loin, de tellement rien. Pour lui aussi c’est dur, sa libido a diminué avec le temps, mais elle est toujours présente. Il n’ose pas me solliciter, craint d’être rejeté. On trouve notre équilibre, on communique. C’est mon asexualité à moi. Chacun la sienne je pense.
Certaines personnes sont complètement asexuelles, d’autres peuvent être aromantiques (ne pas ressentir d’attirance romantique) également, ou pas…
Chacun et chacune a sa sexualité dans ce monde. La mienne c’est celle-là, je peux pas dire qu’elle me convienne vraiment. En fait elle me convient à moi personnellement, mais elle me pose problème quand je considère le couple. Il faut composer avec. Et je me demande toujours « pourquoi ? ». Est-ce que quelque chose a déclenché ça, ou est-ce juste « comme ça » ?
Ah au fait : quelques questions subsidiaires
- Est-ce que je me touche : oui, depuis mes 8 ou 9 ans je pense, ou j’ai découvert par hasard que ça faisait du bien à cet endroit-là. Mais quand je le fais c’est rarement motivé par des pensées sexuelles, juste par l’envie d’un truc agréable (comme un auto massage ou une douche chaude). C’est assez mécanique, en quelques secondes ou minutes, il n’y a pas de scénarisation
- Est-ce que je fais des rêves érotiques : alors oui ! et c’est ce qui me fait me poser plein de questions. Je fais des rêves érotiques où j’allume de ouf mon partenaire, j’ai super envie et aussi très envie de donner envie à l’autre. Y a rarement rapport sexuel par contre, souvent ça s’arrête avant.
Anonyme
Love
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Bonsoir je n’ai jms laissé de msg ms j’aime lire tes aventures ! Je pense être pareil… le tout est de savoir s’ecouter avec ton/ta partenaire. Mais du coup votre couple fonctionne quand même ? Parce que moi je sens que c’est compliqué par moment… je me dis que sur le long terme ça ne fonctionnera pas.
J’ai transmis ta question à la personne ayant écrit l’article 😊
Ah.. sorry j’ai pas bien compris, je pensais que c’était toi qui avait écrit l’article ! Merci..
Non pas celui là ☺️☺️ mais la réponse arrive
C est moi 🙂
le sujet revient régulièrement entre nous. D un côté il y a de la frustration pour lui et la difficulté de ne jamais se sentir désiré et de mon côté de l auto culpabilisation de faire vivre ça à quelqu un. Alors on gère comme on peut, plus ou moins bien. Un exemple de solution qu’on a trouvée c est qu’il me fasse part de son envie si possible plus tôt. C est sur que ce n est pas du tout spontané. Mais en y pensant à l avance, je « programme » que potentiellement il va y avoir du sexe les prochaines heures ou jours et je peux me mettre dans des dispositions plus réceptives. Parce que vraiment, si cela vient sans que je sois prévenue, je pars de très très loin et c est dur pour moi de me mettre dans le mood. Ce n est pas l idéal, mais c est un des ajustements qu’on a fait. Malgré tout notre couple dure depuis dix ans.
Il faudrait aussi lui demander son vécu à lui.